Singulier tatouage

03/09/2016 11:45

La destinée de Jean-Baptiste Bernadotte est pour la moins singulière.

Né dans une modeste famille du Béarn à Pau en 1763, il va petit à petit gravir les échelons militaires puis politiques pour finalement devenir étrangement roi de Suède et de Norvège. Sa dynastie règne toujours à l'heure actuelle sur la Suède et est également liée avec bon nombre d'autres royautés comme la Belgique et la Norvège. Sa femme, Désirée Clary, était le premier amour de Napoléon avec qui elle a été fiancée et qui l'a déniaisée. Républicain puis partisan de l'Empire, ses qualités militaires n'étaient pas exceptionnelles ce qui ne l'a pas empêché d'être bizarremment nommé au grade suprême de maréchal vraisemblablement grâce à son affiliation avec Désirée et son frère Joseph qui avait marié la sœur Clary.

Sous-officier lorsque la Révolution éclate en 1789, Bernadotte passe du grade de lieutenant en 1791 à celui de général en 3 ans seulement. Comme quoi les périodes de conflit génèrent des avancements spectaculaires chez les militaires. Fait maréchal lors de la première promotion en 1804, il est anobli comme sa femme et fait prince de Ponte-Corvo en 1806. Mais ses qualités militaires laissent à désirer et il ne joue pas de rôle majeur dans les prestigieuses victoires du début de l'Empire: effacé à Austerlitz, inactif à Auerstaedt, arrive après la bataille à Eylau et à la bataille de Wagram en 1809, il commande le corps des Saxons qui se débande. Il est mis à l'écart par Napoléon qui le relève de son commandement.

Mais son destin va basculer à l'été 1810, lorsque contre toute attente, il est élu prince héréditaire de Suède, pays où le roi en place se fait vieux et est sans héritier. Ce choix était aussi pour plaire à Napoléon, mais il s'avèrera funeste. En effet, Bernadotte veut asseoir sa dynastie et voit dans le désastre de Russie la fin prochaine de l'Empire, ce qui le fait se rapprocher de la Russie tsarine. Lors de la campagne d'Allemagne de 1813, il fait partie de la sixième coalition contre la France avec l'Autriche, la Russie, la Prusse, le Royaume-Uni, le Portugal et la Sicile. Lors de la première abdication de Napoléon en 1814, on envisage même de la substituer à Napoléon, mais sans succès. Finalement, le 5 février 1818, il devenait roi de Suède et de Norvège sous le nom de Charles XIV Jean (en suédois Karl XIV Johan) et sa femme Désirée Eugénie Clary devient reine sous le nom de Desideria.

Ce fils de simple procureur béarnais, destiné initialement à faire une carrière de légiste, qui a embrassé la cause républicaine, finira roi de deux pays européens dont les dynasties règnent toujours. Les mauvaises langues disent que lorsqu'il était fervent républicain, il aurait fait tatouer sur sa poitrine un message sans équivoque qui deviendra par la suite bien embarrassant pour lui: Mort aux rois !

Ce qui est également curieux, c'est que ni Bernadotte ni son épouse ne maîtriseront la langue suédoise.

Bernadotte sera considérer par beaucoup de Français de l'époque comme un traître au même titre que Fouché ou Talleyrand, faisant passer ses ambitions au premier plan. On se rappelle ici l'anecdote devant la forteresse de Stettin en 1813. Dans son exil à Sainte-Hélène, Napoléon n'oubliera pas de le juger également  très sévèrement:

C'est lui qui a donné à nos ennemis la clé de notre politique, la tactique de nos armées ; c'est lui qui a montré les chemins du sol sacré. Vainement dirait-il pour excuse qu'en acceptant le trône de Suède il n'a plus dû qu'être suédois: excuse banale, bonne tout au plus pour la multitude et le vulgaire des ambitieux. Pour prendre femme, on ne renonce point à sa mère, encore moins est-on tenu à lui percer le sein et à lui déchirer les entrailles.

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Frank Grognet Nivelles
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