Pauvre général la Tempête
Jean-Andoche Junot, Duc d'Abrantès dit la Tempête était un proche de Napoléon. Ils se rencontreront au siège de Toulon (voir article) et Junot deviendra alors son secrétaire.
Ce brave sergent de grenadiers au deuxième bataillon de la Côte d'Or va progressivement, au fil des années, sombrer dans la folie. La cause la plus vraisemblable de sa folie sont ses blessures à la tête, il en aura au total trois! Il souffrira alors de graves maux de tête, de troubles du sommeil et de cauchemars et s'adonnera à la boisson.
Il reçut sa première blessure à la tête au combat de la Glisuelle, au nord de Maubeuge en juin 1792, alors qu'il était sergent. En 1796, il est une nouvelle fois blessé à la tête à la bataille de Lonato en Italie. Il sera finalement une troisième fois atteint à la tête durant la campagne de Russie. Cette dernière blessure crânienne semble être la plus sévère. Un coup de sabre lui a fendu le crâne et la blessure ne s'est jamais bien refermée. Certains témoins affirment qu'on voyait bouger son cerveau sous la peau. Il essaya de calmer ses douleurs avec de l'opium. Se peigner était devenu pour lui une torture. Sa femme, la duchesse d'Abrantès, disait de lui à son retour de Russie en 1812:
Je le retrouvais non seulement changé, mais changé d’une manière alarmante. Il portait en lui une destruction morale… Il avait d’étranges moments d’inquiète souffrance, il pleurait, lui, si fort, si maître de soi, il pleurait comme un enfant…
Ces blessures répétitives l'ayant irrémédiablement diminué, il sombra peu à peu dans la folie et Napoléon lui retira tous ses commandements, lui ordonnant de rentrer chez son père à Monbard en Côte-d'Or. Dans un de ses délires, il se prit pour un oiseau et sauta par la fenêtre du premier étage, se blessant à la jambe. Certains prétendirent qu'il se sera suicidé en se défénestrant, mais si l'on regarde la taille de la maison de son père, on a peine à le croire vu que la fenêtre d'où il se serait jeté n'est pas vraiment assez haute pour se tuer.
Cette hypothèse est confirmée par le témoignage du biographe et historien français Jean Lucas-Dubreton:
Junot, se trouvant dans sa chambre d'enfance de la maison familiale de Montbard, après un éclair de lucidité au cours duquel il reconnaît son père, il aurait soudain déclaré: "Savez-vous que je suis un oiseau et que je vole à mon gré dans les airs?". Et de sauter par la fenêtre, sans se blesser, puis il grimpe sur un mur, s'élance sur la route, tombe, et alors se casse la jambe.
Le chirurgien appelé sur les lieux diagnostiquera une double fracture de la jambe gauche, au-dessus de la cheville. Ne tenant pas en place, Junot arrache ses pansements et tente de s'amputer avec une paire de ciseaux. Une septicémie emportera cet intrépide guerrier, il avait 41 ans.