Toutes les victoires attribuées à Napoléon Bonaparte n'ont pas toutes été décisives malgré la propagande orchestrée de main de maître par l'Empereur, on peut citer par exemple Eylau ou encore la Moskova. De plus, certaines batailles ont failli tourner à la défaite de Napoléon sans certaines actions d'éclat de dernière minute de la part de ses généraux. La plus illustre est la bataille de Marengo, le 14 juin 1800, lors de la seconde campagne d'Italie, qui faillit tourner au désastre si le Général Desaix n'était pas arrivé in extremis sur le champ de bataille pour faire la décision. Il le payera de sa vie.
Parfois, certaines victoires ont été exacerbées alors qu'elles n'étant pas majeures par rapport à un autre affrontement simultané. L'exemple le plus frappant est la bataille de Iéna gagnée par Napoléon sur les Prussiens alors que parallèlement, le Maréchal Davout gagnait la bataille d'Auerstaedt, le 14 octobre 1806. L'histoire a principalement retenu le nom de la bataille d'Iéna par rapport à Auerstaedt. Un pont parisien fut d'ailleurs construit en l'honneur de la victoire impériale. Pourtant la bataille d'Auerstaedt est militairement plus fameuse que ne l'a été Iéna. Mais l'Empereur ne l'entendait pas de cette oreille et ne tolérait pas qu'un de ses maréchaux lui vole la vedette. Jugez plutôt.
La bataille d'Auerstaedt opposa le plus gros de l'armée prussienne du Roi Frédéric-Guillaume III au seul IIIe corps d'armée français commandé par le Maréchal Louis Nicolas Davout soit plus de 60.000 Prussiens contre seulement 27.000 français; plus de 200 canons prussiens contre une quarantaine de bouches à feu françaises. Les Prussiens auront 13.000 morts, blessés ou prisonniers et perdront 115 canons alors que les Français n'auront à déplorer que 4.350 pertes.
A la bataille d'Iéna, les forces en présence étaient un peu plus équilibrées avec un net avantage pour Napoléon qui s'opposait au Général prussien Frédéric-Louis de Hohenlohe-Ingelfingen: 60.000 hommes et 215 canons prussiens contre plus de 80.000 Français et 180 canons. Les Prussiens perdront 25.000 hommes (morts, blessés ou prisonniers), 112 canons et 40 drapeaux alors que les Français ne perdront que 2.500 hommes.
Même si la bataille d'Iéna marque une écrasante victoire de Napoléon, il n'en reste pas moins que la bataille d'Auerstaedt a démontré le génie militaire hors du commun également de Davout qui restera par la suite le seul maréchal à n'avoir jamais été vaincu. Cette grande victoire à Auerstaedt aurait dû rendre Davout plus célèbre si Napoléon n'avait remporté le même jour la bataille d'Iéna. À la suite de cette victoire, qui sera minimisée par Napoléon, se présentant comme le seul grand vainqueur des Prussiens à Iéna, Davout sera quand même fait duc d'Auerstaedt et aura le privilège d'entrer le premier à Berlin à la tête de son IIIe corps.
Il faut toutefois reconnaître que la défaite d’Iéna aura des conséquences importantes dans l'opinion allemande avec le déclenchement d'un violent sentiment de nationalisme allemand qui conduira à l'unification de la nation allemande à la fin du XIXe siècle suite à la guerre de 1870 contre la France impériale de Napoléon III. Lors de la proclamation de l'empire allemand dans la Galerie des Glaces à Versailles en 1871, Otto von Bismarck aura d'ailleurs cette formule célèbre:
Sans Iéna, pas de Versailles!