À table!
La monarchie française avait une étiquette très stricte et guindée. Ainsi la Cour assistait au lever et au coucher du roi ainsi qu’à ses repas. On distinguait le petit couvert et le grand couvert. Pour le petit couvert, le roi était servi dans sa chambre alors que pour le grand couvert, la famille royale était installée dans l'antichambre de la reine. Généralement c'étaient les princesses et les duchesses qui y assistaient, assises, alors que les autres dames restaient debout.
Cette tradition était fréquente sous Louis XIV à Versailles alors que Louis XV l’avait en horreur et préférait prendre ses repas en privé. Quant à Louis XVI et Marie-Antoinette, il n’appliquait le rituel exclusivement que les dimanches.
Selon Wikipedia, le grand couvert (version simple) se déroulait comme suit :
Quand l'ordre de mettre le couvert est donné, l'huissier de salle se rend chez les gardes du corps du roi, en mobilise un et se rend au service du « gobelet ». Ainsi escorté, le chef du gobelet apporte la nef (pièce d'orfèvrerie refermant des serviettes et des coussins de senteurs), tandis que d'autres officiers du gobelet en font de même avec le reste du couvert. Toute personne passant devant la nef doit la saluer. Puis l'huissier retourne chez les gardes du corps et avec une nouvelle escorte se rend à la « bouche ». Les plats de viande sont alors transportés vers la salle du repas. L'huissier de salle marche en premier, suivi par le maître d'hôtel, puis par le gentilhomme servant pour le premier plat et d'autres officiers pour les autres plats. Chaque plat est escorté par trois gardes carabine à l'épaule. Arrivés dans la salle les plats sont reçus par le gentilhomme dit de prêts. Le gentilhomme porteur du premier plat, le goûte avant de le poser sur la table dite de prêts qui est entourée de trois gardes. Il en est de même pour les autres plats. Ensuite les gentilshommes servants les portent sur la table du roi, qui alors se sert.
Quand Napoléon devint empereur il réinstaura le grand couvert.
Lorsque l’empereur et l’impératrice dinait de la sorte, leur table était placée sous une tonnelle placée sur une plateforme surélevée avec seulement deux chaises. L’empereur arborait un chapeau à plumes et l’impératrice un diadème. Leurs majestés étaient informées par le Grand Maréchal du Palais quand les préparatifs étaient faits. Entraient alors dans la salle les personnes suivantes dans cet ordre précis: les pages, les assistants des maîtres de cérémonie, les préfets du palais, le premier préfet avec un maître de cérémonie, le Grand Maréchal et le grand maître de cérémonie; l’impératrice assistée de son premier écuyer et de son premier chambellan; l’empereur, son colonel-général de la Garde, le grand chambellan et le grand écuyer et le grand aumônier qui bénissait le repas. Tout ce beau monde se retirait alors pour laisser leurs majestés en tête-à-tête sauf si des invités de rang royal étaient présents ou si de plus humbles avaient été reçus sur invitation.
Cependant, en captivité, Napoléon émit des réserves sur ce rituel on ne peut plus royal comme l’écrivit Las Cases dans ses mémoires…
L’empereur hésita pendant un certain time, dit-il, de rétablir le Grand Couvert des rois de France, à savoir, le diner en public, chaque dimanche, de toute la famille impériale. Il nous demanda notre opinion sur le sujet. Nous avions des avis divergents. Certains l’approuvaient comme bénéfique pour le moral public et adapté pour produire les meilleurs effets sur l’état d’esprit du public sans oublier qu’il offrait le moyen de voir son souverain. D’autres s’y opposèrent, objectant que cette cérémonie revêtait un caractère de droit divin et de féodalité, d’ignorance et de servilité qui n’avait aucune place dans nos habitudes ou dans la dignité moderne de celles-ci. Ils pouvaient voir le souverain à l’église ou au théâtre ; pouvant ainsi se joindre à lui dans ses rites religieux ou prendre part à ses divertissements ; mais le voir manger était ridicule.
Eh bien, dit l'empereur, il est vrai que les circonstances du temps auraient dû limiter cette cérémonie à l'héritier impérial et seulement durant sa jeunesse; étant donné qu'il était le fils de la nation toute entière; il doit dès lors devenir l'objet des sentiments et de la vue de tous.